L’Odeur du Luzin : L’Œuvre d’un Marin, un vrai

Science
Typography

Il me l’avait promis et je constate avec fierté qu’il a bien tenu parole, car il était à mon humble avis, le meilleur d’entre nous qui pouvait encore le faire. Si nous les marins, on aime bien s’exprimer en silence, malheureusement pour nous, ce silence ne laisse pas de traces et nos gloires de tous les jours s’évanouissent à la fin de la journée.

Aujourd’hui, nous pouvons nous en enorgueillir, un des nôtres, un vrai marin, a décidé de prendre sa plume et naviguer dans le flot des mots, pour écrire une nouvelle, qui ne va certainement pas être la dernière, mais le début, d’une longue et nouvelle aventure.

Merci Mon Cher Ami, Mohammed Rida EL MARIKY, d’avoir brisé ce silence, dans lequel se contenait les marins marocains depuis si longtemps.

L'odeur du luzin

L'odeur du luzin un récit sincère et houleux, un camaïeu d'impressions évoluant au gré des phrases et des mots, des vagues et des vents. Il transporte loin, très loin dans un univers marin réel saupoudré d’expériences intenses et de sensations trépidantes, agrémentées du bleu soufré des mers, des moiteurs salées des grelins et de l’humeur des personnes rencontrées. L’œuvre vous ballotte au rythme des flots et des jusants, vous arrache de la platitude du temps sur un navire.

Tantôt marin embarqué, tantôt pilote, Chamsi enchâsse ses moments de spleen et de joie, de colère et de sagesse comme de l’étoupe de calfatage dans le bordage d’un vieux gréement, mais qui résiste encore aux caprices des océans. À travers les lignes se dessinent une invitation au voyage, une plongée volontaire dans les abysses des pages nanties d’anecdotes cachées dans une malle à souvenirs du protagoniste, rêvant de les partager tel un butin. Se nommerait-il, par hasard, Chamsi ?

Au fil des pages

Le 4 juin 1995, alors que Chamsi était de quart à la passerelle du car-ferry Marrakech, il reçut un appel téléphonique interne à 21 h 24. C’était un garçon de cafétéria au bout de la ligne qui lui annonça qu’une personne était tombée par-dessus bord. Chamsi prit la chose au sérieux, car en mer on ne badine pas avec la sécurité.

Pas de place pour les plaisanteries lorsque des vies humaines sont menacées ! Mais pour en avoir le cœur net, Chamsi demanda au garçon de cafétéria :

— C’est toi qui l’as vue ou on te l’a juste rapporté ?

Le matelot fut tellement surpris par cette question que ses mots frottaient entre ses dents pour à peine pouvoir articuler :

— Non, ce n’est pas moi. Ce sont deux vieillards, des passagers qui jouaient aux cartes sur le pont arrière qui avaient vu des mains agrippées au bastingage tribord lâcher prise lorsqu’ils entendirent un soupir venant de tout près et une voix dire bismillah. L’affaire était sérieuse. Sans hésiter, Chamsi se mit à exécuter la liste des vérifications MOB2 qu’il connaissait par cœur pour l’avoir établie lui-même. Il appela bien évidemment le capitaine qui était dans son salon en train de dîner, et lui annonça calmement :

— Commandant, on m’a appris qu’un passager est tombé par-dessus bord et j’ai déjà entrepris les manœuvres qui s’imposent.

Le témoignage d’un Grand, Hervé Baudu de l’Académie de Marine

Ce recueil se lit comme l’eau qui s’écoule le long de la coque ; fluide, gracieux, léger. Chamsi, nous fait partager son amour pour la mer, sa passion pour son métier et sa conviction que toute son histoire n’a de saveur qu’avec tous ces gens qu’il a croisés.

Car la vie de marin, comme il le dit si bien, n’est rien sans les rencontres des personnes qui partagent les océans. Il y a les marins que l’on côtoie à bord au quotidien et avec qui il faut souvent s’accorder, il y a ceux qui restent des amis fidèles comme compagnons de « galère » ou ceux d’une rencontre à l’occasion d’un pilotage, pas toujours facile.

Les marins sont des techniciens de fort caractère. Chamsi les apprécie même si parfois dans l’exercice de son rôle de pilote, il doit composer. Mais c’est à travers ces rencontres, ces conflits parfois, que Chamsi progresse, se perfectionne, jubile.

Tous les marins se reconnaîtront dans L'odeur du luzin. Dans certains endroits du monde, un port se sent avant de l’apercevoir. Que ce soit l’odeur entêtante du fuel, des vapeurs âcres de la cuisine, de la cigarette d’une passerelle enfumée, la mémoire du marin est d’abord olfactive. L’odeur ramène au passé. Ces souvenirs qui émaillent ce recueil sont l’écho, en quelque sorte de la vie de tous les marins avec leurs histoires, leurs rencontres, leurs odeurs...

A propos de l’Auteur Mohammed Rida EL MARIKY

Mohammed Rida El Mariky est pilote major adjoint à la station de pilotage du port de Tanger Med ; station qu’il intégra en 2009. Après des études dans le domaine des sciences, l’appel de la mer est tellement intense qu’il passe un concours pour intégrer l’Institut Supérieur d’Études Maritimes (ISEM) de Casablanca.

Après trois années d’études théoriques, il embarque en tant qu’élève-officier pont pour cumuler les 24 mois de navigation lui permettant d’obtenir son brevet de Lieutenant au long cours. Il navigue alors sur les navires de la Compagnie Marocaine de Navigation (COMANAV) à laquelle il reste fidèle jusqu’en 2002.

Le métier de pilote le passionnant, il intègre la station de pilotage des ports de Casablanca et de Jorf Lasfar en 2003. L’année suivante, l’envie de renouer avec les bancs de l’université devient irrésistible. Il divorce alors temporairement avec le pilotage maritime pour aller s’installer à Aix-en-Provence où il se consacre entièrement à sa thèse de droit maritime et décroche en 2009 un doctorat à la prestigieuse Université Paul Cézanne.