« Le Maroc doit rebâtir sa flotte nationale pour garantir sa souveraineté maritime » Mohammed El JAOUADI, Président d'ARMA

Marine Marchande
Typography

Le président de l’Association des Armateurs du Maroc, Mohammed Jaouadi, a livré un plaidoyer vibrant en faveur de la renaissance de la marine marchande nationale. S’appuyant sur la vision royale exprimée dans le Discours du 6 novembre 2023, il appelle à une mobilisation collective pour reconstruire une flotte marocaine moderne, compétitive et au service de la souveraineté économique du Royaume.

Lors d’une rencontre consacrée à l’analyse du Discours de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, prononcé le 6 novembre 2023 à l’occasion du 48ᵉ anniversaire de la Marche Verte, Mohammed Jaouadi, président de l’Association des Armateurs du Maroc (ARMA), a livré une intervention marquée par une profonde conviction : le Maroc doit renouer avec sa vocation maritime et reconstruire une flotte nationale digne de son histoire et de son ambition. « Sa Majesté a tranché en annonçant clairement la nécessité pour le Maroc de se doter d’une flotte marchande nationale, forte, moderne et compétitive », a-t-il déclaré, saluant un discours royal « très attendu » et porteur d’une orientation stratégique majeure.

Pour El Jaouadi, ce discours marque un tournant dans la politique maritime nationale. Il ne s’agit pas seulement de relancer un secteur économique, mais de poser les fondations d’une souveraineté maritime renouvelée. « Le Roi nous a dit : allons-y, réfléchissons à quelque chose de grand. Il sait d’avance que ce n’est pas facile, mais il a ouvert la voie », a-t-il affirmé avec un ton à la fois lucide et mobilisateur.

Dans ses propos, le président de l’ARMA a souligné que la reconstruction d’une flotte ne peut se limiter à l’achat de navires : elle doit s’inscrire dans une refonte globale du modèle maritime marocain, incluant la formation, la fiscalité, la gouvernance et la compétitivité internationale.

Reconnaissant l’ampleur du défi, Jaouadi n’a pas caché les difficultés structurelles qui freinent aujourd’hui le développement du pavillon national. « Le chemin est très long à refaire », a-t-il concédé, rappelant que le Maroc a perdu progressivement son savoir-faire maritime au profit d’autres nations mieux préparées. Il a déploré que, malgré les progrès réalisés dans des secteurs comme l’automobile ou l’aéronautique, le transport maritime demeure en retrait. « Nous ne pouvons pas rester spectateurs alors que 90% du commerce mondial se fait par la mer », a-t-il martelé.

Sur le plan économique, le président de l’ARMA a pointé du doigt les obstacles réglementaires et fiscaux qui dissuadent les investisseurs. Le Maroc, a-t-il expliqué, ne dispose pas encore d’un cadre fiscal compétitif, à l’image de la « taxe au tonnage » adoptée par la majorité des grandes nations maritimes. Ce dispositif, a-t-il rappelé, rend le transport maritime plus rentable et encourage l’investissement dans les flottes nationales. « Aucun investisseur ne placera son capital sous pavillon marocain tant que les conditions d’attractivité ne seront pas réunies », a-t-il averti. À cela s’ajoute des difficultés dues au manque de digitalisation : alors qu’un navire peut être immatriculé en 48 heures dans d’autres pays, la même opération peut prendre plus de temps au Maroc, un décalage qui nuit gravement à la compétitivité du pavillon national.

Mais au-delà de ces questions techniques, Mohammed El Jaouadi a insisté sur le cœur du problème : la disparition progressive des compétences maritimes. « Nous sommes en train de perdre la matière qui est essentielle », a-t-il regretté, en appelant à un sursaut national pour sauvegarder et développer le capital humain. Il a plaidé pour la refonte du système de formation maritime, la valorisation des métiers de la mer et la création de passerelles entre générations de professionnels. Pour lui, le renouveau de la flotte marocaine ne pourra se faire sans ingénieurs, marins, logisticiens et cadres formés aux standards internationaux.

Sur le plan stratégique, le président de l’ARMA a replacé la question maritime au cœur de la souveraineté nationale. Les crises successives (de la pandémie aux tensions géopolitiques ) ont montré, selon lui, la nécessité pour chaque pays de sécuriser ses approvisionnements vitaux. « Disposer d’une flotte, c’est protéger notre commerce extérieur et garantir notre indépendance dans les moments de crise », a-t-il insisté, citant la France et le Japon comme exemples de nations ayant fait de leur flotte un outil de résilience économique. Il a également évoqué le modèle singapourien, rappelant comment l’État insulaire a su, dès les années 1970, bâtir une stratégie maritime intégrée reposant sur la formation, la logistique et la technologie. « Pourquoi pas nous ? », a-t-il lancé avec conviction.

El Jaouadi a souligné que le Maroc possède tous les atouts pour devenir un hub maritime régional : une position géostratégique unique, des infrastructures portuaires de pointe  dont Tanger Med, connecté à plus de 180 ports à travers le monde, et une vision royale claire orientée vers la souveraineté et la durabilité. Il a appelé à transformer ces atouts en un écosystème maritime complet, articulé autour d’une gouvernance unifiée. « Il faut une autorité maritime nationale, dotée de moyens et de prérogatives clairs, capable de piloter la stratégie, de simplifier les procédures et de coordonner les efforts entre les acteurs publics et privés », a-t-il recommandé.

En conclusion, Mohammed El Jaouadi a livré un message d’unité et d’espoir. Pour lui, la vision royale offre une occasion historique de redonner au Maroc sa dimension maritime et de faire de la mer un levier de croissance durable et de souveraineté économique. « Nous avons la plateforme, nous avons les atouts, et surtout, nous avons un Roi qui nous montre la voie », a-t-il déclaré. Avec une conviction inébranlable, il a appelé à une mobilisation collective pour relever ce défi ambitieux : « Le travail est immense, mais la direction est claire. À nous d’agir, ensemble, pour redonner à la marine marchande marocaine la place qu’elle mérite dans l’économie du Royaume et sur la scène internationale. »

Pour réagir à ce post merci de vous connecter ou s'inscrire si vous n'avez pas encore de compte.