Oulmès : 73 ans et 2 millions de litres consommés chaque mois !

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C’est la première boisson à avoir été embouteillée au Maroc
Dans l’imaginaire populaire, elle a des vertus miraculeuses
Les ventes pendant l’Aïd El Kébir sont trois fois supérieures à la moyenne.

La démarche est immuable : à la veille de l’Aïd El Kébir ou lors de festins familiaux, les chefs de famille n’oublient jamais de consacrer une partie de leur budget à l’achat d’eau gazeuse, Oulmès de préférence. Durant cette période, cette boisson arrive même à damer le pion aux sodas beaucoup plus prisées en temps normal. La raison de cet engouement est simple : riche en bicarbonate,cette eau aurait un effet apaisant sur l’estomac et faciliterait la digestion.Quoi donc de plus utile pendant cette fête où viande et graissesont incontournables ?

Mais d’où vient cette eau ? S’extirpant de la profondeur d’unaccident de terrain, dans un sous-sol de nature granitique, dans la régiond’Oulmès, à quelque 70 km au nord de Rabat, l’eau naturellementgazeuse de la source Lalla Haya jaillit à une température de 42°.Ses vertus ont d’ailleurs été prouvées par une étudeconduite par le ministère de la santé en 1968 déjà.Son histoire est cependant beaucoup plus vieille que cela. Découverteattribuée, dans l’imaginaire populaire, à Lalla Haya, lasource est réputée avoir des vertus miraculeuses. Il fut mêmeun temps où «certaines pharmacies vendaient des préparations à based’Oulmès», raconte Abdelkhalek El Youbi, DG de la Société deseaux minérales d’Oulmès. Pour mémoire, Oulmèsest la première boisson a avoir été embouteilléeau Maroc.

Des bouteilles acheminées par téléphériquesur 5 km
L’exploitation industrielle ne commence pourtant qu’en 1933, à l’initiatived’une entreprise française, la Compagnie fermière des eauxminérales Oulmès. Celle-ci employait alors une dizaine de personnes. «Al’époque, les bouteilles étaient lavées à lamain dans des bacs chauffés au feu de bois», rappelle M. El Youbi.Des traces de l’ancienne activité sont encore visibles sur le sitede production. En raison de la nature accidentée du terrain, les bouteilles étaientremplies puis acheminées par téléphérique sur unedistance de 5 km jusqu’aux camions. Eu égard à ces conditionsde travail difficiles, on n’arrivait à charger qu’un seulcamion par jour. Les bouteilles de 90 et de 25 cl qui constituaient l’offrede l’époque sont encore en circulation, à ce jour, dans leSud et l’Oriental. Vingt ans après le début de l’exploitation,en 1954 précisément, l’usine d’embouteillage est transféréesur l’ancien plateau de chargement de l’eau. Cela a été rendupossible par l’installation d’un système de pompage. Du coup,la productivité a augmenté et les ventes ont évolué favorablement.

En 1998, l’arrivée des bouteilles en PET dope la consommation
En 1971, l’entreprise est rachetée par le groupe Bensalah qui vaaccélérer le processus d’industrialisation. Dans les années80, les ventes connaissent une progression annuelle de l’ordre de 3 à 4%.Un nouveau coup d’accélérateur est toutefois donné,au début des années 90, avec le lancement de nouvelles bouteillesen verre d’une contenance de 20 cl et d’un litre. Mais la vraie révolutionintervient en 1998 : l’emballage en plastique (PET) fait son entrée.La bouteille de 50 cl élargit la gamme. Pour l’entreprise, le coûtde la logistique est comprimé.

La demande suit, sachant que l’on n’est plus obligé de consommerla totalité de la boisson après l’ouverture de la bouteille.Avec une capsule à visser, les risques de voir le gaz s’échappersont amoindris.
Résultat : au cours de la dernière décennie, les ventesont crû à un rythme moyen de 11 %, par an. Aujourd’hui, aumoins 30 millions de bouteilles de différentes contenances sont consomméeschaque année, ce qui représente 23 millions de litres, contre environ10 millions au milieu des années 90. On notera que le marché présenteun caractère saisonnier : il atteint des pics lors des fêtes tellesque l’Aïd El Kébir, où les ventes sont trois fois supérieures à lamoyenne mensuelle. Dans tous les cas, la marge de croissance reste encore importante.En effet, la production actuelle pourrait être multipliée par quatre,selon M. El Youbi.

A ce jour, Oulmès, naturellement plus riche en carbone que des eaux traitéesartificiellement, n’a pratiquement pas de rival sur le marché. Leseaux gazeuses importées sont trop chères au regard du pouvoir d’achat,et Bonaqua de Coca-Cola n’a pas pu concurrencer la marque sérieusement.A tel point que, dans le langage populaire, l’eau gazeuse est tout simplementdésignée par le terme «oulmès». C’estdire que l’image du produit est très forte. Il n’en demeurepas moins que l’entreprise continue à investir dans la communication,dont l’objectif actuel est de sortir la marque du carcan du «produitde table». Ainsi, tous les messages sont axés sur la nature, commeon le voit d’ailleurs sur les étiquettes des bouteilles. A notertoutefois que la calligraphie qui orne ces étiquettes a été réaliséedans les années 1930.

Côté prix, si, à contenance égale, Oulmès estvendue 70 % plus cher que les autres eaux minérales, en revanche, à 5,90DH la bouteille d’un litre, son prix est inférieur à celuides sodas. Outre l’inflation, les 50 centimes pris par le litre entre 1998et 2006 sont expliqués par la hausse du coût de l’emballageen PET suite à la flambée des cours du pétrole, à partirduquel il est fabriqué. Selon le management, le prix est même contenugrâce aux économies d’échelle consécutives à l’augmentationdes ventes. Un autre facteur peut aussi être invoqué : le circuitde distribution est totalement intégré. Une stratégie quipermet de mieux maîtriser le comportement du marché grâceaux liens qui se tissent avec les distributeurs et les gros clients comme lesCHR (cafés, hôtels, restaurants) et, in fine, de doper les ventes.

"Paru dans la Vie Eco, l'histoire des marques"

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