L'industrie mondiale peut se féliciter des différents plans de relance massifs mis en place dans différents pays, qui permettent une reprise de la demande, notamment en Chine et aux Etats-Unis. Mais cette reprise se fait de manière brutale et désordonnée, provoquant des tensions sur les prix des matières premières, le fret maritime, les approvisionnements et les délais.
Les prix des puces électroniques, des fibres textiles, des oléagineux, du soja, du blé, du maïs, des plastiques, du PVC, de l'acier et des métaux non ferreux, etc. ont connu des hausses allant jusqu'à 100% ces derniers mois. Une flambée des prix qui complète celle connue sur le marché du fret.
Une situation qui touche des pans entiers de l'industrie marocaine et qui fait craindre une répercussion sur les consommateurs. De l'agroalimentaire au textile, de l'automobile au plastique, les industriels marocains tirent la sonnette d'alarme.
Ont-ils répercuté la flambée sur leurs marges ou sur le prix final ? Qu'en est-il des leviers nationaux face à cette perturbation du commerce international ?
Après la pandémie, les industriels sont désormais confrontés à un nouveau défi : la hausse concomitante du prix de la quasi-totalité des matières premières industrielles et agricoles.
Récemment, les fabricants d'huile au Maroc ont été contraints de publier un communiqué pour expliquer l'augmentation des prix de vente de leurs produits, observée sur le marché national et qui avait suscité l'inquiétude de certains consommateurs.
Estimant que la situation risque de durer, l'Association des fabricants d'huile a demandé l'intervention de l'Exécutif pour limiter les dégâts, tant pour le consommateur qui a de plus en plus de mal à accepter ces augmentations, que pour les triturateurs qui prétendent vendre à perte.
Depuis, d'autres associations professionnelles comme la Fenagri ou la Fédération interprofessionnelle des viandes rouges (Fiviar) lui ont emboîté le pas pour alerter sur la hausse des prix des matières premières sur le marché international.
Si les producteurs d'huile de table ont déjà commencé à répercuter la hausse, les professionnels des viandes rouges, eux, ont averti que cette augmentation des matières premières au niveau international finira, d'une manière ou d'une autre, par impacter les prix des viandes rouges.
Il faut dire que de nombreux opérateurs marocains s'inquiètent de cette augmentation importante et rapide du prix des matières premières.
La reprise de la demande brutale, anarchique, a provoqué une augmentation significative de l'offre. En effet, la loi de l'offre et de la demande est à l'œuvre : tout est plus rare et donc plus cher.
Par exemple, la situation est particulièrement tendue pour les fabricants d'aliments pour animaux : depuis plusieurs mois, la hausse du prix des matières premières agricoles a fait flamber le prix des aliments pour animaux (voir "Matières premières agricoles : la hausse des prix commence à se faire sentir sur le marché marocain").
L'industrie textile marocaine n'est pas non plus épargnée. Après avoir puisé dans leurs stocks, les industriels marocains du textile subissent des hausses de prix des matières premières.
Sous l'effet de la pénurie de matière et d'une forte reprise de la demande, les prix du lin, du coton ou du polyester ont augmenté de plus de 30% ces derniers mois.
Ce qui n'est pas sans provoquer des tensions avec les clients. "Ces derniers, tant sur le marché national, qu'international ne veulent rien savoir", déplore Mohamed Boubouh, président de l'Association marocaine des industries textiles et de l'habillement -AMITH- (voir témoignage).
La conjoncture est également mauvaise pour le secteur automobile, qui fait face depuis plusieurs mois à une pénurie de semi-conducteurs et à une hausse des prix de l'acier et du plastique. "Les matières premières représentent environ 8% du prix départ usine d'un véhicule", indiquent les analystes de la Deutsche Bank dans une note récente. L'acier représente environ un tiers de ce prix.
L'acier galvanisé a même augmenté de 100 % en six mois ! Mais ce qui dérange le plus les constructeurs automobiles, c'est la pénurie mondiale de composants électroniques, qui a entraîné une baisse significative du nombre de véhicules vendus.
Les sites de production de Renault et de PSA au Maroc ne sont pas non plus épargnés. Cette pénurie de puces électroniques qui touche l'industrie automobile mondiale, n'est pas sans conséquence sur le marché national de la distribution.
"Compte tenu de ce problème lié au manque de semi-conducteurs dans l'industrie automobile, les 2e et 3e trimestres laissent entrevoir de gros problèmes liés aux ventes de voitures neuves", a déclaré Adil Bennani, président de l'Association des importateurs d'automobiles au Maroc-AIVAM (voir témoignage).
Si dans certains secteurs de l'industrie, les prix des matières premières sont à la fête, du côté des transports aussi, la flambée des prix due à l'explosion de la demande est impressionnante. Les tarifs des conteneurs ont augmenté de plus de 300%.
Plus chers mais aussi plus rares, cette pénurie de conteneurs inquiète également l'industrie depuis plusieurs mois. Pour analyser la situation au Maroc, l'équipe de l'Observatoire Marocain de la Compétitivité Logistique (OMCL) a réalisé un questionnaire qui a recueilli les réponses de 54 entreprises.
80% des entreprises exportatrices confirment avoir subi une augmentation des tarifs de location des conteneurs. Ce pourcentage est plus élevé parmi les entreprises importatrices. En effet, 89% de ces entreprises ont connu des augmentations de tarifs.
En termes de taux d'augmentation, 54% des entreprises exportatrices ont vu leurs tarifs augmenter de moins de 50%. Les augmentations les plus importantes concernent les entreprises importatrices : plus de 43% de ces entreprises ont vu leurs prix augmenter de plus de 150%, dont 28% ont vu leurs tarifs augmenter de plus de 200%. Ces entreprises traitent principalement avec l'Asie et l'Europe.
Les effets de la pénurie de conteneurs sur les délais de livraison ont touché les importateurs beaucoup plus que les exportateurs. "La pénurie de conteneurs est le résultat de deux facteurs simultanés :
L'augmentation de la demande européenne et américaine de produits chinois et le blocage de nombreux conteneurs de livraison dans certains pays en raison de restrictions sanitaires ", analyse Euler Hermes. Du coup, les armateurs se réorganisent, n'hésitant pas à pénaliser les importateurs et les exportateurs. Ainsi, au Maroc...
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