Les récents transits de CMA CGM par Suez ont ravivé l’idée d’un retour généralisé via la mer Rouge. Les données opérationnelles montrent pourtant que le secteur reste prudent et fidèle au cap de Bonne-Espérance.
Les récents passages du CMA CGM BENJAMIN FRANKLIN et du CMA CGM ZHENG HE par le canal de Suez ont immédiatement relancé les spéculations. Pour certains observateurs, l’événement marquerait le début d’un retour massif des grandes alliances maritimes vers les routes traditionnelles de la mer Rouge, après des mois de déroutements par le cap de Bonne-Espérance. Une hypothèse séduisante, mais trompeuse.
Car derrière ces transits très commentés, les faits racontent une tout autre histoire. Les analyses d’Alphaliner montrent que CMA CGM n’a pas modifié sa stratégie de manière structurelle. Au contraire : malgré une légère désescalade sécuritaire en mer Rouge, les prochains voyages du service FAL1 ( sur lequel opéraient les deux navires ) seront à nouveau routés autour de l’Afrique, conformément au schéma adopté par la majorité des grands armateurs depuis le début des tensions.
Les deux passages observés relèvent davantage de manœuvres ponctuelles, parfaitement cohérentes avec la stratégie flexible de CMA CGM, qui a conservé en 2025 un usage limité mais continu du canal de Suez, sans jamais compromettre la sécurité de ses lignes principales.
Dans ce paysage, une exception confirme la règle : le service MED5 de l’OCEAN Alliance, opéré exclusivement par CMA CGM. C’est le seul loop d’alliance à avoir maintenu toute l’année une présence régulière en mer Rouge, avec des navires de 10 000 à 15 500 EVP transitant par Suez. Ses partenaires – COSCO Shipping Lines, Evergreen Line et OOCL – y prennent des slots, mais n’y déploient aucun tonnage.
CMA CGM exploite aussi la route de Suez sur son service MEDEX, reliant le Moyen-Orient, le sous-continent indien et la Méditerranée, un loop où COSCO et OOCL disposent de capacités mais qui fonctionne en dehors du périmètre formel de l’OCEAN Alliance.
En réalité, loin d’annoncer un basculement sectoriel, les transits récents illustrent la prudence persistante des grandes alliances maritimes. La mer Rouge n’est pas totalement écartée, mais elle n’est pas non plus redevenue une option de plein exercice. Le marché observe, les armateurs ajustent, mais le retour massif évoqué par certains analystes reste, à ce stade, une projection plus qu’une réalité opérationnelle.
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